Propriété privée

 

Un article de Livingstone.

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Quand la charte de Hôdo pose comme deuxième article celui du droit à un refuge, le problème de la privatisation d'espace est évoqué. Il n'y a alors qu'un pas, facile à franchir, pour parler politique. Quelle politique peut représenter l'esprit hôdon ?

Des politiciens du libéralisme adorent clamer sur un ton doctoral empreint de l'illumination du « bon sens » : « la liberté est incompatible avec la solidarité ». Voilà encore une de ces fausses vérités dont on assène le bon peuple ! Cette petite phrase anodine veut tout simplement dire : il n'y a pas de droit pour les perdants.

La propriété se conquiert, la tour d'ivoire et le jardin secret s'achètent comme le reste. Il ne tiendrait à chacun que de choisir le bon camp, celui des gagnants. Élaborez votre plan de carrière, et avancez comme Orphée sans vous retourner vers vos rêves d'enfance.

Gagnez votre pain à la sueur de votre front, dans l'espoir de décrocher la situation qui vous permettra de les réaliser si vous y croyez encore, d'ici là. En attendant, si le travail ne vous a pas broyé, vous pouvez toujours vous consoler en commentant très fortement pour que votre entourage reconnaisse votre grandeur : « Paix sur la Terre, à bas les tyrans, honte aux pollueurs... ! »

Comme si la « liberté absolue » pouvait exister ! La liberté n'a que la place que lui accorde le hasard, un hasard d'ailleurs bien bridé pour reprendre l'expression d'Hubert Reeves.

Ces élites n'arrivent pourtant pas à admettre qu'une certaine solidarité est inévitable pour la plupart des mammifères. À moins, bien sûr, que les ultralibéralistes se rapprochent plus des veuves noires que des loups, des rapaces ou des requins. Pourtant, les hommes de guerre, qu'il s'agisse des emblématiques samouraïs et des preux chevaliers, ou des redoutables familles de brigands ou des mafias, reconnaissent les mérites de la solidarité, celle qui est combien de fois mises en valeur dans les légendaires histoires d'héroïsmes . Ces combattants ont tous érigé des lois qu'ils observent sur « l'honneur » (c'est à dire, qu'ils respectent la parole donnée) pour la simple et unique raison qu'il est difficile de se reposer, une lame entre les dents, une oreille toujours à l'écoute, et l'autre, couchée sur l'inséparable arme de poing. Il n'y a rien de pire pour une armée d'occupation que le harcèlement permanent des résistants qui empêche tout repos.

Mais la gent d'armes et les assassins ne constituent pas la majorité de l'humanité. D'autre part, il est plus « civilisé » de créer une dominance où la loi du plus fort ne fait pas gicler le sang et n'embrase pas le terrain à conquérir.

Le monde économique basé sur la trilogie, capital, consommation et « liberté », déplace sur d'autres plans les combats pour la dominance. Les rois de cet univers n'ont pas de couronne, mais ils ont toujours leurs châteaux !

Le libéralisme n'est qu'une idée démagogique choyant certains groupes de conviction politique au même titre que le socialisme flatte d'autres classes sociales.

Les systèmes communistes n'ont pas réussi à instaurer leur utopie. Ils découvrirent trop tard que l'ennemi à vaincre n'était pas hors de leur système. Et il n'était pas possible d'isoler le mal interne dans des goulags retirés. Ce mal était encore plus à l'intérieur, plus profond, il est en chacun de nous.

La domination peut revêtir tous les aspects... Si par malheur elle est refoulée, alors l'emprise des dominants peut être encore plus sournoise. Il suffit de réveiller les frustrations si nombreuses. Même si ce n'est pas l'apanage des politiques extrémistes, il faut reconnaître que toutes les impressions d'agressions offrent de belles opportunités pour tous les dictateurs de la planète pressés d'asseoir leur pouvoir au nom de la légitime défense.

Personne n'est à l'abri de l'esprit de domination. Même ceux qui choisissent ou inventent des politiques plus centristes.

Et que dire lorsque la politique obéit à l'éthique d'une religion ? Il est si facile de faire croire qu'un clan est élu d'un dieu même si ce dernier s'appelle « république ». Il vaut mieux être enchaîné à une « morale » humainement incontestable qu'à une simple « loyauté » à un contrat toujours renégociable.

Plus la domination s'étend sur un nombre important de sujets, plus les dominants vont se trier dans une pyramide hiérarchique. C'est pourquoi l'anarchie refuse l'« ordre » établi des chefs et sous-chefs. Depuis longtemps déjà, les anarchistes condamnent les intrigues du pouvoir qui embrigadent les populations. Hélas, c'est encore ignorer où se situe la source du problème (quoique de nombreux anarchistes se réfèrent fréquemment aux idées de H.Laborit).

Même, dans un état anarchiste idéal, un système acratique, qu'est-ce qui peut au niveau d'une famille supprimer le jeu de domination entre sexes et âges ? Et, faut-il empêcher aux enfants de jouer entre eux s'ils ont tendance de créer des « bandes » ?

La maîtrise de l'esprit de dominance, le « détournement de l'agressivité », requiert une telle vigilance, une telle dépense d'énergie qu'il est indispensable pour chacun de se recharger les batteries. C'est pourquoi le deuxième article de la constitution des Hôdons est : Respecter le droit à l'intimité et à l'évitement.