Hôdo, la légende
Serge Jadot


D’aussi loin que je me souvienne, l’Espace m’a fasciné.

Je ne pense pas que j’essayais de fuir un monde physiquement hostile ou psychologiquement pesant, peut-être même, que l’inconnu n’était pas le moteur de cette interrogation.

L’infini, et au-delà... en soi, ce concept me fascinait...

Mes questions semblaient si étranges aux yeux des autres que peu à peu un autre domaine m’envoûta : comment se faisait-il que nous ne pensions pas tous de la même façon, et dans ce cas comment se pouvait-il que nous arrivions à nous comprendre parfois ?

Qui pouvait prouver que le rouge que je voyais était le même pour les autres?

Très tôt, je posais ces questions sans réponses, ces questions qui donnent de mauvaises notes au catéchisme et dans lesquelles mes parents imaginaient mon futur, astronome ou médecin.

Mais je n’en fis qu’à ma tête ! Pour aller si loin, il fallait autre chose que des fusées et je devins physicien, et plus tard, je rejoignis comme chercheur une équipe japonaise en Bolivie à l’étude des rayons cosmiques reliant des cultures distantes entre l'infiniment petit et l'infiniment grand.

Je crois que l’on peut tomber en physique comme d’autres en religion. La physique est un monde si enrichissant d’humilité face à l’univers, un monde où l’on peut encore jouer aux aventuriers dans la pénombre des frontières du connu.

Mais je ne suis pas un héros, ni un savant, ni un sage, loin de là. Je suis lent et en même temps, par surcompensation, toujours pressé.

Je suis un volcan, stable comme la roche, inamovible comme la montagne, et soudain magma en furie...

Ce cerveau qui échappait à ma maitrise m’intriguait jusqu’au jour où je découvris une œuvre de H.Laborit « l’agressivité détournée ».

Lentement, très lentement puisque c’est ma nature, une idée germa. « Mon oncle d’Amérique » fut une étape, mais je croyais que le message passerait mieux au travers d’une légende, d’une mythologie...

Je me mis patiemment à peindre avec des pinceaux et de l’huile des univers de fictions et des personnages de légende en m’y attardant sur leur portrait peut-être pour me préparer à les dépeindre avec une simple plume.

Et un jour, je me risquai à écrire une histoire de Star Trek.

Les rêves de mondes inconnus, lointains ou intimes, convergèrent peu à peu jusqu’à donner naissance à un monde qui se voulait à la fois science-fiction et science cognitive.

Hôdo était né.

Comme la pierre précieuse ou le bonzaï que l’on taille tout en suivant leurs règles, mon histoire prit souvent des formes que je n’imaginais pas à l’origine.

Hôdo naquit tout d’abord sur la toile pour être accessible au plus grand nombre et poser les jalons d’une saga que j’espérais — et espère encore — être un terrain de découvertes de bio-socio-psychologie humaniste à travers des contes de science-fiction.

Les deux premiers volumes furent présents sur mon site éponyme, puis diffusé entre autres par « copyleft_attitude ».

J’eus l’honneur de voir le deuxième volume sélectionné pour être présenté à « La Villette Numérique 2004 ». On me demanda d’écrire un troisième volume et j’essayai de l’éditer sur papier.

L’idée était de créer un univers de SF à l’instar de celui de Star Trek développé autour du concept onusien de Gene Roddenberry. Je souhaitais animer des auteurs de science-fiction à développer des idées de politique fictive, en quelque sorte, des expériences de la pensée dans des tubes à essai virtuel, pour apporter de nouvelles idées dans les politiques du monde réel. Mais, je ne voulais pas que, comme la célèbre série, que l’univers de Hôdo soit soumis à une seule entité commerciale et surtout culturelle.

Depuis, j’ai écrit d'autres romans dans l’univers de Hôdo basés sur des idées de H.Laborit : le détournement de l’agressivité, l’évitement de la domination de l’homme par l’homme et le droit à l’évitement et à la fuite. Ces idées se cristallisèrent dans les lois de Hôdo qui gouvernent toute la saga.

Ainsi, à l’instar des histoires d’Isaac Asimov tournant autour des trois lois de la robotique, toutes les histoires de Hôdo tournent autour de trois règles sociales :

  • Respecter toute intelligence ainsi que son support.
  • Respecter le droit à l’intimité et à l’évitement.
  • Soumettre au hasard toute décision commune n’acquérant pas de consensus.
Finalement, ces trois lois et leurs conséquences en « politique », je les analyse dans de nombreux feuillets d'essais de politique hôdonne, tous en ligne et en Copyleft.

Extrait des « Pionniers de Hôdo »

Journal personnel de Makuta Chibwabwa, astronome à bord du Livingstone.

Je ne me souviens pas quand les étoiles ont attiré mon regard.

Je me souviens seulement que quelqu’un m’a dit qu’elles étaient loin, très loin, beaucoup plus loin que ça.

Alors, je me suis demandé dans quelle gigantesque sphère elles étaient enfermées avec nous au milieu.

On m’a dit qu’elles étaient enfermées par l’infini.

L’infini? Difficile à comprendre pour un enfant... je préférais une sphère bien délimitée.

Mais alors, et si la sphère elle-même était enfermée dans une autre sphère... Une infinité de fois!

Mes compagnons ne comprenaient pas mes questions stupides de rêveur qui ne comprenait rien aux jeux de société du foot au flirt.

Alors, je me suis demandé : « Pourquoi ne ressentons-nous pas tous la même chose?

Qu’est-ce l’intelligence? Qu’est-ce qui prouve que ce que je comprends est compris par les autres et vice versa?... »

Questions stupides... je me retournai vers les étoiles. « Et vous là-bas! Y a-t-il une intelligence pour partager notre solitude dans notre sphère de compréhension? »

Je savais que je n’aurais pas de réponse même en devenant astronome en quête de lointaines lumières...

Je sais que je n’aurai peut-être pas de réponse en me portant volontaire pour ce voyage.

Mais peut-être que je ferai un petit pas vers la Vérité... Si elle existe...

Hôdo

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