Manipulation

Un article de Livingstone.

Plus je réfléchis à l’expérience de Milgram, plus je crois que l’« autorité » en soi n’est pas la cause de cette manipulation/soumission.

Je crois que le problème est dû au fait que notre intelligence, et donc nos compétences, ne peut embrasser toutes les connaissances d’une société à laquelle nous appartenons. C’est précisément pour cette raison que nous appartenons à des regroupements humains, parce que nos besoins sont tels qu’ils requièrent de nombreuses expertises, et d’autant plus nombreuses que nous appartenons à des sociétés complexes. En outre, plus nous sommes contraints de partager nos ressources, plus nous avons besoin de nous assurer que le négoce est gagnant/gagnant pour assurer la paix indispensable à la synergie.

Donc que ce soit pour le savoir ou pour la médiation, l’homme a tendance naturellement à confier son sort — et celui des autres dans l’expérience de Milgram — à des êtres qui sont censés être savants ou sages.

Un autre facteur agit dans l’expérience de Milgram : l’uniforme. En effet, l’expertise attendue du savant ou du sage n’est pas marquée sur son front. C’est là que les conventions vestimentaires interviennent, car tous les apparats sont des communications, des messages adressés aux autres. Dès l’instant où on croit qu’un moine porte l’habit, alors, par extension, on ose espérer que sous l’habit, il y a bien un moine, même si on sait sciemment que ce n’est pas une certitude, car le doute et l’immobilité sont plus insupportables que l’erreur. Ainsi, sommes-nous faits.

Cela me conforte dans l’idée que la société hôdonne doit être acratique, afin d’éviter que le pouvoir de décider et d’agir soit aveuglément attribué à un savant ou un sage.

Dans l’expérience de Milgram, dès que le cobaye se sent moins observé il se prend plus facilement la liberté de désobéir. L’humain obéit non seulement parce qu’il fait confiance à quelqu’un qui « domine » un sujet, mais aussi parce que refuser de suivre celui qui a une certaine « autorité » en la matière peut être une cause de bannissement du groupe, source d’angoisse pour l'être grégaire que nous sommes. C’est à dessein que j’utilise les mots « domine » et « autorité », car il n’y a pas loin pour tomber dans l’« autorité dominante ».

Enfin, lorsqu’un Dominant veut imposer ses règles, il leur donne un poids moral, bien plus efficace que n’importe quelle prison. Ainsi, il y avait sûrement des cobayes qui ressentaient plus de « honte » à trahir l’« autorité » qu’à supprimer une vie pour le devoir. Ils agissaient comme de vrais soldats. Mais il ne faut pas oublier que mettre au chômage, procède du même raisonnement impitoyable, surtout qu’on peut s’attaquer à autre chose que la vie : l’intelligence.

Cela implique deux chose l'obéissance pour ne pas être banni.