Le Projet Hôdo
Le joule comme monnaie universelle basée sur l’énergie

Une monnaie étalon basée sur l’énergie pure
  1. pour maîtriser le gâchis «écologique»,
  2. ne pas être soumis aux monopoles économiques,
  3. assurer le même revenu minimum à tous les citoyens de la Terre.
Cela implique un système d’étalonnage indépendant de toute spéculation entre pays ou groupes de nations Ce serait un système sous le contrôle d’un organisme mondial tel que le Bureau international des poids et mesures.

Ici, on paie en joules!

Table des matières

  1. L'énergie comme monnaie
  2. Un système juste
    1. L’indépendance géopolitique
    2. Le travail humain
  3. Économie écologique
    1. Les dépenses énergétiques de production
    2. Le rendement, la qualité et la créativité
    3. Les coûts des cycles de vie
    4. Les valeurs intrinsèques
    5. Une rémunération juste
    6. Illustration du modèle
  4. Un système équitable
    1. Des échanges circulaires
    2. Le revenu universel
    3. Et la paresse?
    4. Le capital
    5. L’urgence!
    6. Le partage de la Terre>
  5. Pour l’anecdote

L'énergie comme monnaie

Lorsque les mesures furent étalonnées, il y eut, paraît-il, un rejet des commerçants. Utiliser des poids, des longueurs, des volumes «normalisés» les laissait perplexes. On peut imaginer qu’il en sera de même avec la monnaie qui pourtant fut à son origine «étalonnée». L’or a souvent servi de étalon, car la monnaie était en quelque sorte un troc facilement transportable. L’or n’est d’ailleurs pas le seul étalon. Par exemple dans la province du Shaba (Katanga) dans la République Démocratique du Congo, la «croisette» était aussi une monnaie «normalisée», mais sur le cuivre.

La monnaie ne représentait pas des unités physiques comme le kilo, le litre, le mètre, la coudée, la seconde… En effet, le troc introduisait en même temps que les objets physiques ou virtuels échangés des notions «d’effort» d’obtention de ces objets. Par exemple, la rareté engendre la fameuse loi de «l’offre et de la demande», loi qui ne s’accommode pas de «normes». Même l’or qui sert d’étalon peut être soumis à cette loi, ce qui, évidemment, pénaliserait les terres qui en sont dépourvus.

Pourtant, tout est énergie et tout travail obéit aux lois de la thermodynamique. Normaliser au moins cet aspect semble imparable si l’on veut plus de justice et de maîtrise écologique.

L’énergie est déjà en soi la «monnaie» de l’Univers.

Quels seraient les avantages d’une telle monnaie étalonnée sur l'énergie?

Ce modèle permettrait d’enrichir le concept de cybermonnaie. Ces dernières pourraient s’appuyer sur du «concret» comme l’or qui, tout comme l’énergie, est fiable dans le temps et l’espace. Pourtant, ce métal dit noble a une énergie atomique facilement estimable qui peut servir de point de départ tangible à une monnaie-énergie. Est-il d’ailleurs nécessaire de passer par un «intermédiaire» comme l’or ou le cuivre qui n’est pas présent partout sur la planète? Un intermédiaire qui peut donc être monopolisé quelque part. L’énergie, elle, est présente partout. Mieux, elle ne se crée pas et donc ne connaît pas d’endettement. Néanmoins, elle peut se stocker, se «capitaliser», et fournir une énergie potentielle disponible. Même l’Univers capitalise.

Une monnaie étalon basée sur l’énergie permettrait aussi de mesurer de nombreux facteurs apparemment «abstrait». Ainsi, dans le travail humain, la qualité du travail manuel, celle du cerveau, la gestion du stress… et bien d’autres facteurs méritent rétribution.

Mieux! L’énergie, nous en recevons sans cesse du Soleil! N’est-ce pas là, la rétribution universelle dont on rêve parfois dans certains concepts sociopolitiques d’assistance aux démunis, sans avoir recours à divers stratagèmes qui dépouillent parfois Pierre pour habiller Paul?

Et quel meilleur outil pour mesurer les dépenses des ressources de la planète, et donc gérer au mieux l’écologie! Quelles surprises aurions-nous en comptabilisant les dépenses pour produire des conserves en boîtes métalliques ou des aliments maintenus dans les congélateurs des frigidaires personnels? Mesurer toute l’énergie d’une création depuis sa naissance jusqu’à son abandon est sans doute la manière la plus sûre de savoir si un choix est meilleur qu’un autre du point de vue écologique.

Un système juste

L’indépendance géopolitique

En tout premier lieu, une telle monnaie aurait l’avantage de la neutralité géopolitique.

L’énergie est pareille et identiquement mesurée sur toute la planète,
indépendamment des populations qui occupent un territoire et de leurs alliances économiques.

L’énergie comme étalon monétaire permettrait de ne plus soumettre des populations à des dévaluations imposées par des puissances détentrices de «leur étalon» monétaire. Ce type de dévaluation devrait être considérée comme un acte ségrégationniste, car derrière, se cache la dépréciation du travail humain des régions concernées. C’est d’autant plus grave que l’on sait combien le «salaire» est une marque de reconnaissance. Or voir son pouvoir d’achat diminuer correspond à une sanction, d’autant plus injuste qu’elle est décidée par des puissants qui décident de la valeur à attribuer à une monnaie locale et indirectement à des humains.

Cela permettrait aussi de ne pas rétribuer différemment les humains selon leur région, autorisant, par exemple, de faire travailler des salariés à prix réduit ou de surpayer du personnel en mission dans ce type de pays.

Le travail humain

L’humain, comme tout être vivant, est du point de vue purement de la physique, une «machine» qui travaille en transformant les énergies au sein desquelles il est plongé.

Or vivre implique déjà en soi un travail.

L’humain dépend de nombreux facteurs: société lui assurant sa survie en respectant un protocole à la fois hérité et adaptable permettant d’échanger idées et objets avec efficacité et sécurité; biologie résultant de millénaires de spécialisation au sein d’un écosystème aujourd’hui si non fragilisé, du moins perturbé. Dans tous les cas, la vie sous toutes ses formes et avec toutes ses manifestations n’existe que parce qu’elle gère des échanges énergétiques.

(Extraits de Wikipédia) Le métabolisme est soumis aux principes de la thermodynamique, qui régissent les échanges de chaleur et de travail. Le deuxième principe de la thermodynamique indique que, dans tout système fermé, l’entropie (c’est-à-dire le désordre) tend à augmenter. […] la vie n’est cependant possible que parce que tous les organismes sont des systèmes ouverts, qui échangent matière et énergie avec leur environnement. […]

Le métabolisme de base (MB), ou métabolisme basal, correspond aux besoins énergétiques «incompressibles» de l’organisme, c’est-à-dire la dépense d’énergie minimum quotidienne permettant à l’organisme de survivre; au repos, l’organisme consomme de l’énergie pour maintenir en activité ses fonctions (cœur, cerveau, respiration, digestion, maintien de la température du corps), avec des réactions biochimiques […]

À cette dépense énergétique de repos, on peut signaler deux autres types de métabolismes:

Métabolisme postprandial: dépense calorique consécutive à un repas…

Métabolisme de l’exercice: dépense calorique consécutive à un effort physique ou au cerveau pendant un travail intellectuel ou de concentration intense (examens, conduite automobile…). Ce besoin est difficilement quantifiable étant donné qu’il varie d’un individu à l’autre et d’une situation à l’autre.

Dans tous les cas de figure, la «machine» humaine consomme de l’énergie. Son intelligence primaire d’être vivant consistera à trouver de l’énergie consommable, pour maintenir son existence et la prolonger. Une intelligence plus «évoluée» cherchera à améliorer le rendement de l’acquisition et de l’emploi des ressources.

Par extension, tout «commerce» de l’homme avec son environnement, et donc l’humanité elle-même, est énergétique. Une monnaie permettant de mesurer cet échange sur une base énergétique pourrait au moins par exemple assurer le «minimum vital» que requiert son existence. Si un SMIC, un RSA, une pension de retraite doivent exister, ils devraient au moins représenter le métabolisme minimum de l’humain. Par métabolisme minimum, nous entendons le métabolisme de base auquel s’ajouteraient ceux qui s’imposent pour un minimum d’activité sociale et sécuritaire. Si notre société ne permet plus de profiter spontanément des dons de la nature (énergie, abri), il peut paraître logique que la «société» compense cette perte individuelle, dont elle-même a bénéficié. En effet, par exemple, si la société a construit des espaces de pierre pour les besoins de l’ensemble de ses membres à la place d’espaces agricoles, de cueillette, de chasse…, il faudrait compenser cette perte. Il en est de même, si cela empêche de construire soi-même son abri à partir des éléments locaux. Dans chacun des derniers cas cités, c’est une juste réattribution des dons de l’Univers qui, en fin de compte, se mesure toujours en énergie.

Encore une fois, cette mesure, même si elle peut dépendre des climats et autres facteurs géologiques, serait indépendante de la géopolitique proprement dite.

Le métabolisme d’un bébé pygmée ou celui d’un vieillard inuit ne dépend d’aucune considération financière, géopolitique, voire ségrégationniste.

Économie écologique

Les dépenses énergétiques de production

L’intérêt d’une monnaie basée sur la notion d’énergie est qu’elle est propice à représenter le véritable travail fourni lors de la production de biens (de «consommation» ou non).

La fabrication d’un objet est une succession de travaux ayant un prix énergétique: extraction de matières premières, affinage, alliage, mises en forme… jusqu’à son usage final. Et ensuite, le recyclage procède presque de la même manière, sauf que cette fois, le «minerai» n’est pas extrait du sol, mais récupéré des «déchets». Il faut noter que la notion de recyclage occulte souvent le fait qu’il y a malgré tout consommation d’énergie. Ce qui est souvent passé sous silence comme s’il s’agissait d’un mensonge par omission pour «rassurer» les âmes candides et bien pensantes quant à l’écologie.

Dans tous les cas, il faut tenir compte de la dépense énergétique de tous les transports, de tous les stockages, et ne pas oublier d’additionner toutes les activités humaines dédiées à chacune de ces actions.

Le rendement, la qualité et la créativité

Le rendement au sens de la physique serait indirectement récompensé. En effet, toute créativité permettant de produire à moindre coût énergétique serait automatiquement répercutée par une monnaie-énergie. Un tel système inciterait à réduire les dépenses de production et à produire plus à moindre coût. Il ne faut pas confondre ce rendement au sens de la physique avec celui du travail qui a une notion de productivité dans le temps. D’ailleurs, ce rendement «industriel» s’apparenterait plus à un calcul de puissance, toujours au sens de la physique, c’est-à-dire de travailler plus vite. Dans quel but? Produire plus pour consommer plus?

Dans un fonctionnement écologique qui ne serait pas inventé par une idéologie, mais résultant de l’observation des lois de l’univers, le slogan «travailler plus pour gagner plus de pouvoir d’achat» devrait disparaître. En effet, ce slogan devrait devenir «travailler mieux pour dépenser moins».

En revanche, il faut toujours tenir compte d’une notion incalculable par l’énergie seule, et introduire une nouvelle notion de «négociation». Cette notion ferait intervenir des qualités difficilement représentables par la seule énergie déjà dépensée ou échangée. En effet, l’art qui résiste à l’usure du temps, qui apporte des conforts à l’âme, économisera de l’énergie dans le futur. Et le chercheur, même fondamental, apportera peut-être des solutions géniales pour mieux utiliser l’énergie dans un futur peut-être lointain. La qualité manuelle ou intellectuelle continuera à avoir son prix et ceux qui la développent mériteront plus que jamais une récompense, même si elle n’est pas physiquement mesurable.

Les coûts des cycles de vie

Les coûts des différentes phases d’un produit, sa création, son perfectionnement, sa maintenance, son recyclage… seraient aussi mesurés avec précision, ce qui permettrait d’évaluer l’intérêt à choisir certaines orientations plus sages, même l’abandon d’un projet qui s’avérerait plus coûteux que la création d’un nouveau.

Il n’y aurait pas ainsi de mode «écologique» pouvant se développer autour de concepts omettant certaines «dépenses». Ainsi les recyclages de matières seraient peut-être vus sous un autre angle qui n’aurait d’autre but que rassurer la consommation en oubliant par exemple systématiquement le prix de la production et du stockage de l’électricité lorsqu’on vante une innocuité écologique.

Inclus dans le cycle de vie et souvent oublié, il y a le stockage. Pas seulement celui de l’énergie, mais celui de tout ce qui doit être conservé pendant un certain temps. Il ne s’agit pas que de conserver en batterie de l’énergie, dans des réservoirs des combustibles, mais aussi les denrées alimentaires, les objets qui vieillissent d’une manière ou d’une autre, par la rouille, la décomposition. Certains de ces produits requièrent même de très basses températures… et donc encore une fois, énergie, énergie, énergie…

Les valeurs intrinsèques

Deux sortes de coûts «intrinsèques» devraient être prises en compte dans le prix des choses: celui de la matière elle-même et celui de la vie.

Le coût de l´existence de la matière

On parle souvent du prix de la rareté de certains matériaux. Il est toujours spéculatif et pourtant lui aussi peut être quantifié de manière rigoureusement scientifique, même au niveau de sa structure nucléaire. Plus un noyau a coûté énergétiquement cher pour exister, plus il est rare.

Quant aux réactions physico-chimiques qui ont conduit à l’existence de certains éléments simples (atomes) ou complexes (molécules…), cela aussi peut être mesurable.

Le coût de la vie

De même que le métabolisme pourrait être une base pour mesurer le revenu minimum et salarial d’un individu, on pourrait utiliser une méthode analogue, biologique, pour mesurer le prix des produits agricoles. Ainsi, un animal se nourrissant de végétaux est une chaîne de transformation énergétique.

Ces valeurs intrinsèques pourraient déterminer le coût écologique des matières premières et des ressources agricoles, sylvicoles, piscatoires…

Le prix de la maintenance

Ces valeurs intrinsèques ne seraient pas reversées à un quelconque propriétaire. Elle devrait l’être à un fond commun planétaire permettant de gérer le renouvellement des ressources.

Dans un tel raisonnement, personne ne serait donc propriétaire d’un quelconque sous-sol ni d’ailleurs d’un être vivant, et a fortiori humain. Seul mérite salaire le travail pour gérer ses différentes ressources: richesses minières, aquatiques, sols cultivés ou non, cheptel, animaux domestiques, associés, salariés ou non…

Dans la gestion de la planète, intervient aussi la notion d’abri, à nos yeux, indispensable pour tout être vivant. Il s’en suit que l’entretien d’un espace sécurisé pour se reposer, s’approvisionner ou travailler a aussi un coût énergétique, donc redevable.

Une rémunération juste

En utilisant la notion d'énergie comme valeur de base dans nos échanges, nous pouvons alors paraphraser dès lors la fameuse phrase «à travail égal, salaire égal» en «à énergies consommées égales, rétributions égales».

La gestion d’une économie basée sur l’énergie devrait mener à reconsidérer le prix du travail réalisé par toute la chaîne de production. Le travail qui consiste à transformer ou déplacer quelque chose pour obtenir autre chose est très souvent le résultat de toute une chaîne de travaux individuels. Or, chaque membre de la chaîne en question doit être rétribué. Il s'en suit que le prix final d'un objet inclura cette accumulation de dépense d'énergie.

Illustration du modèle

Un paysan produit du blé. Pour simplifier le raisonnement de l’exemple, on omet qu’il a fallu au préalable avoir des semences, travailler la terre, fabriquer des moulins… Mais ici, nous nous contentons de «cueillir» le blé à la main. Il y aurait alors deux lots d’énergies pour représenter le travail de l’agriculteur: l’énergie du blé en soi et celle du récolteur. Mais ce blé n’est pas exploitable directement. Il faut le transporter au moulin, ce qui va ajouter deux paires de lots d’énergie. Sans rentrer dans les détails, il y aura d’une part le travail du transporteur et d’autre part l’énergie du moyen de transport, puis le travail du meunier et celui du moulin. Ce blé devra être transformé pour être propre à la consommation, d’où deux autres paires de lots: le travail transporteur suivant et l’énergie du moyen de transport, puis le travail du boulanger et l’énergie du four. On peut même imaginer que ce pain va être vendu en grande surface, d’où une nouvelle collection de paires d’énergies: transporteur-transport, magasinier-stockage… La personne qui viendra acheter ce pain devra payer au prorata les différentes énergies consommées. Là aussi, il y a deux lots: d’un côté, l’énergie de tous travailleurs, et de l’autre, celles des machines qui se sont usées, des carburants brûlés, de la terre qui s’est appauvrie…

Le premier lot devra rétribuer le travail humain et le second assurer la maintenance des machines dont la plus importante de toutes: la Terre. Ce dernier lot serait géré par une sorte de Banque Écologique Mondiale.

Avec cette petite illustration, on veut montrer la notion de paires de dépenses: celles effectuées par l’humain, et celles engendrées par l’utilisation d’outils et d’autres êtres vivants. Ces derniers requièrent soins et alimentation, c’est-à-dire de nouveaux apports d’énergies, même en tant que matière inerte.

Ainsi, si le producteur a dépensé 20 joules d’énergie personnelle et 20 joules d’énergie non personnelle (autres hommes, machines, matières premières…), le consommateur devra lui payer 40 joules. En fin de transaction, le consommateur aura perdu 40 joules et le producteur n’aura reçu que 20 joules.

Cela aura pour conséquence que plus les dépenses seront élevées, plus l’acquéreur se tournera vers un système plus économique, donc avec un meilleur rendement. Un travailleur qui produirait un produit plus cher à qualités égales par manque d’optimisation se verrait pénalisé comme dans les systèmes actuels de concurrence, mais cette fois-ci, énergétiquement mesuré.

On voit ici le grand écart avec nos systèmes actuels de rémunération. Il n’y a pas d’enrichissement possible par le travail en soi! En effet, cette rétribution ne correspond qu’à la perte d’énergie du travailleur. Il faudra donc trouver autre chose pour, par exemple, récompenser la qualité d’un travail, éventuellement purement intellectuel. Sinon, il y aurait même un risque d’appauvrissement de celui qui ne dépend que du travail physique des autres, sans apporter de valeur ajoutée. On serait donc, en résumé, devant une sorte de SMIC dynamique et universel assurant la vie d’un humain.

Il faut préciser et insister sur le fait que cet exemple ne sert qu’à montrer les flux d’énergie du producteur au consommateur qui se décomposent systématiquement en deux parts. Malgré les omissions faites pour faciliter la démonstration de l’implication d’une telle économie basée sur l’énergie, on peut se rendre compte qu’elle ne serait jamais juste à 100%. En effet, il faudra sans cesse par la suite des réajustements pour tenir compte de tel ou tel flux d’énergie oublié ou mal évalué dans les mesures précédentes. Mais, surtout, il reste en réalité une troisième part qui échappe, du moins actuellement, aux mesures physiques de l’énergie.

Cette troisième part comprendrait les gains d’énergie conséquents d’une créativité, d’une qualité artisanale ou d'une main-d’œuvre professionnelle, de la gestion d’équipes, et même des risques encourus et parfois subis, etc.

Un système équitable

Des échanges circulaires

La notion d’aides de solidarité pourrait être aussi à revoir sous la lumière de la monnaie-énergie.

En effet, au lieu de se perdre en calculs complexes et à force injustes, car incapable de prendre en compte tous les cas particuliers, il serait préférable de donner à chaque humain une sorte de droit à la vie depuis la naissance jusqu’à la mort. De l’énergie, nous en recevons à chaque instant notre part donnée essentiellement, directement ou indirectement, par le Soleil et la gravitation, et cela bien avant la notion de monnaie et de finance, à l’instar de tous les êtres vivants et de toute l’humanité qui a précédé nos «grandes» civilisations, sans omettre celles du commerce, du grand capital et de la course à la consommation. Il est évident que cela ne fera pas disparaître les besoins d’assistance, car personne n’est à l’abri d’incident grave, mais cela améliorerait les flux d’échanges tellement opacifiés par l’absence de mesures fiables adaptées à chaque besoin.

Si l’on regardait tous les flux, les plus banals, par exemple celui que le boulanger va payer à l’État qui en donne une partie à l’armée qui paye l’entreprise travaillant pour elle, laquelle verse le salaire de l’ingénieur qui va acheter son pain chez le boulanger… Combien d’échanges sont finalement d’une manière ou d’une autre «circulaires»? Ce qui a été donné d’une main est repris par l’autre. De manière caricaturale, on pourrait dire que le boulanger a donné de l’argent à l’ingénieur pour qu’il se nourrisse chez lui à condition que ce dernier ait contribué à l’armement de son pays. Cette vision devrait mettre en question la notion d’imposition, de taxe, etc.

Le flux de la consommation ainsi que les capitalisations, du point de vue énergétique sont bien des réalités sans valeurs ni politiques ni morales. Les analyser sous cet angle peut nous conduire à d’autres concepts économiques.

Le revenu universel

Dans la foulée, un revenu universel, manne du ciel, devrait pouvoir faire disparaître toutes les notions d’aide récurrente, puisque tout le monde les recevrait. Ce serait une sorte de «don» à la vie depuis la naissance jusqu’à la mort, planétaire et identique, pour tous. Un «don» et non un «droit», car nous n’avons aucun droit sur l’Univers.

Cette manne du ciel serait bienvenue en milieu urbain, compensant l’absence de nature pour se nourrir et s’abriter. Mais n’est-ce pas le cas déjà actuellement pour une très large majorité? De manière primitive, ce don se résumerait aux fruits de la chasse, de la pêche, de la cueillette, de la culture locale, et au maintien d’un environnement sécuritaire. Dans notre monde moderne, cela contribuerait, par exemple, d'office aux études à partir de la maternelle jusqu'aux divers perfectionnements professionnels; cela assurerait un SMIC jamais soumis aux fluctuations de l'économie et du marché; cela assurerait la vie d'un retraité.

Le travail apporterait alors un excédent par rapport aux besoins minimums. Il servirait alors à améliorer son bien-être. D’où l’importance du rendement au sens physique du terme! L’énergie accumulée pourrait être aussi capitalisée comme toute énergie qui peut être stockée. Quels seraient d’autres avantages?

La maîtrise écologique

Maîtriser l’énergie de bout en bout devrait être un «idéal» écologique. En effet, maîtriser la consommation d’énergie lors de la production de bien-être vitale ou non permettrait d’éviter aux moins deux problèmes de notre société de «consumation». Cela permettrait de contrôler d’une part l’exploitation des ressources difficilement renouvelables, et d’autre part, la production de déchet de combustion tel que l’excès de CO2.

On ne peut vivre pour la consommation alimentée par et pour la production, cela a un coût énergétique que personne ne relève et qui a un effet auto-alimentation difficilement contrôlable. C’est là qu’est la dépense de la planète. Il faut donc apprendre à fabriquer pour durer, ce qui est diamétralement opposé à l’esprit actuel de la consommation.

Une «assurance» contre les catastrophes

La pandémie du COVID-19 montre à quel point, un revenu universel serait bienvenu pour tous les travailleurs qui sont obligés d’interrompre leurs activités rémunératrices.

Mais ce n’est pas le seul cas. Que dire des catastrophes naturelles que l’on dit de plus en plus fréquentes à cause du réchauffement de la planète? Et que dire des guerres, toutes mangeuses de vies et d'énergie, qui sans répit frappent au moins un endroit sur la Terre?

Et la rétribution de la garde du foyer?

La manne de Gaïa pourrait aussi payer la personne au foyer pour porter l’enfant à venir, protéger sa venue dans notre monde, le nourrir et lui donner les premiers enseignements qui feront de lui un être humain? Pourquoi ces talents ont-ils été relégués dans les oubliettes? Pour pouvoir participer à la société de consommation avec la pseudoétiquette d’égalité?

Une incitation à la paresse?

Et si tout le monde reçoit une «manne du ciel», est-ce que cela ne serait pas propice à la paresse?

Tout d’abord, il faut s’entendre sur la notion de «paresse» qui peut être une maladie, une forme d’abus, une marque d’intelligence…

Tout d’abord, toute malade mérite cette manne, car l’énergie solaire ou gravitationnelle ne fait aucune discrimination sur l’état de santé physique ou psychique des bénéficiaires.

Mais la paresse n’est pas qu’une «maladie». L’intelligence de la vie pousse à inventer les solutions qui permettent de se fatiguer le moins possible, tout en récoltant au moins autant de bénéfices. C’est pourquoi on crée des machines ou exploite d’autres êtres vivants. Il y a donc une tendance naturelle, saine et logique à vouloir paresser.

Le problème est ailleurs. Il est relationnel, le cas extrême étant lorsque nait le conflit entre ceux qui peuvent avoir l’impression d’être injustement dépouillés du fruit de leurs efforts pour ceux qui ne donnent rien en retour de ce qu’ils reçoivent.

Cette manne éviterait l’assistanat «passif». L’assistance est une aide de la société offerte pour que quelqu’un sorte d’une difficulté quand elle est provisoire ou survive décemment quand elle est définitive. Mais il arrive que cette assistance n’ait pas les bienfaits psychologiques attendus. Pire, ce type de personne assistée s’installe dans un dû sans ressentir la moindre reconnaissance ni le moindre besoin à reprendre un rôle actif dans la société qui l’aide. Ce type de paresse ne serait plus supportée par la société, mais permise par l’énergie universelle sans frustrer qui que ce soit.

En revanche, rien n’interdirait de travailler plus pour réaliser ses rêves, même si ceux-ci ne consistent qu’à collectionner du «capital». Si l’humain a besoin de repos et de sérénité, il a souvent besoin d’agir, ne fût-ce que pour le plaisir personnel de se savoir utile à sa communauté ou de vaincre une difficulté, un challenge peut-être. La différence serait énorme, car le stress ne serait plus centré sur la survie, mais sur l’exploit.

Le capital

Dans l’esprit de ménager les efforts, le besoin d’économiser s’impose comme une solution incontournable. Et, qui dit «économie», implique presque toujours «capital».

La principale vertu du capital est précisément de faire des réserves pour les coups durs. C’est le cactus qui stocke l’eau pour résister aux sécheresses, il en est de même pour le chameau, le randonneur qui prend sa gourde… Mais évidemment, il y a toujours ceux qui pillent les étals pour se faire des réserves inutiles, quitte à priver les autres… Ce n’est pas un argument pour bannir la notion de capital.

Au contraire, peut-être serait-il aussi temps de changer complètement la vision du crédit et de repenser à l’utilité de l’épargne et de ce que cela implique. En effet, aucun système physique ou biologique ne vit à crédit. Et jusqu’à présent, aucun physicien n’a démontré que l’on pouvait créer de l’énergie. Pour produire un travail, il faut puiser l’énergie dans des ressources disponibles.

Le capital est incontournable en physique, c’est l’énergie potentielle.

Cette énergie est présente partout, et elle l’est aussi en biologie. Or l’emprunt n’existe pas en biologie: un être vivant ne peut jamais consommer plus que ce qu’il a, sinon, il meurt. Il faut donc épargner et mettre en réserve des aliments ou matériaux pour plus tard.

Mais, l’épargne n’est pas gratuite en soi. D’où la recherche de moyens de stockage adapté. Certains s’orienteront vers des ressources fiables et inaltérables dans le temps comme l’or ne demandant pratiquement pas d’énergie de maintenance. Mais l’or n’est pas rapidement exploitable pour n’importe quel travail qui dans la majeure partie du temps doit se réaliser dans un délai relativement court. En biologie, le stockage se fait sous forme d’éléments facilement exploitables, généralement sous la forme de glucides, éventuellement dans des «organes de réserve» appropriés. Mais au-delà, il faut souvent maintenir des structures externes, à commencer par les abris contre des prédateurs ou pour supporter les intempéries. Il faudra aussi très souvent gérer des réserves alimentaires pour éviter de se fatiguer à dépenser trop d’énergie ou risquer de ne plus avoir de renouvellement automatique… Tout cela impose des réparations, de la maintenance. Et même les batteries ne sont pas éternelles.

Nous sommes toujours soumis dans la flèche du temps à l’entropie génératrice de désordre.

Cette situation va créer un phénomène de rétroaction sur le capital: plus il y a de capital, plus les dépenses pour le conserver vont s’accroître. Est-ce la source du «capitalisme»? Dans le site Hôdo, nous refusons à l’instar des conseils de H. Laborit de faire de la «morale». Le capitalisme «hypertrophié» est peut-être une maladie psychique, une sorte de dépendance par peur de manquer aux moindres bienfaits que le capital déjà acquit a permis de réaliser tant de «rêves». C’est peut-être plus une maladie de gourmandise ou une forme de boulimie qu’une sorte de rapacité prédatrice. C’est peut-être tout compte fait une manifestation de la volonté de domination qui sommeille en chacun de nous.

Quoi qu’il en soit, ce capital n’est pas que le mal personnifié et n’est pas nécessairement un trésor réservé exclusivement à un individu avare ou un clan autarcique. À l’instar de la reine chez les insectes sociaux, il n’est pas rare que le capitaliste alimente souvent une «colonie» plus ou moins importante. Certes, on peut lui reprocher sans doute de ne pas assister d’autres fourmilières ou de profiter des insectes ouvriers.

Le capital peut grossir souvent par la chance, mais tout aussi grâce à plusieurs formes de courage, comme la persévérance, l’audace, etc. Alors, faut-il répartir cette «chance» pour aider ceux qui n’en ont pas? Faut-il déshabiller Pierre pour habiller Paul? Ce type de répartition n’apporterait probablement aucun résultat bénéfique. En effet, il y aurait à peu près 3 milliards de personnes recensées comme pauvres, qui la plupart du temps n’ont même pas accès à de l’eau salubre. Même si la personne la plus riche au monde a une fortune de plus de 300 milliards de dollars, cela ne représenterait que 100 dollars donnés à ces pauvres. Et encore, donné en une seule et unique fois, car le milliardaire en question n’aurait plus rien.

Si l’on veut tendre la main à tous ceux qui sont en difficulté, il vaut mieux distribuer un revenu universel à l’abri de toute spéculation, même si certains se contentent de s’endormir dessus. Et si l’on perd tout d’un coup? L’individu sera rapidement naturellement renfloué, car cette manne est permanente et indépendante de toute spéculation financière. De plus, avec une monnaie mesurant vraiment l’énergie, le perdant ne se retrouvera sûrement pas endetté. Seulement, il n’aurait plus rien pour dépenser et ne pourrait troquer que son travail. Pourtant, là, un capital de secours peut être indispensable à maintenir. Un tel capital en prévision de situation d’urgence pourrait (devrait?) être collectif et ajusté selon les besoins par une contribution collective. Cette imposition ne devrait servir qu’à maintenir les structures partagées par des communautés, et non à maintenir une fausse redistribution qui est en réalité purement politique.

L’urgence

Il existe enfin un autre «capital» présent dans toute activité: le temps. L’esprit du rendement poussé à l’extrême, le fait de vouloir forcer des personnes à travailler à 100% de leur temps pour être «rentable», est un risque pour tous les métiers qui doivent gérer à l’improviste l’urgence. Il serait sans doute plus sage de limiter les activités professionnelles à 80% pour précisément garder ce capital-temps afin de pouvoir répondre à l’urgence. Alors, qu’en serait-il de ces 20%? Pourquoi ne pas les utiliser pour la veille technologique, le perfectionnement de ses compétences, en autoapprentissage, ou, par défaut, des tâches interruptibles à tout instant et ne requérant pas de délai? Ces 20% devraient servir aussi au repos qui suit une surcharge d’activité due au traitement d’une urgence.

Le partage de la Terre

Proche de l’utopie, peut-être, mais puisque l’on parle d’une manne du ciel, pourquoi ne pas suggérer aussi la manne de la Terre? La Terre n’appartient en soi à personne. C’est ce qu’on y fait qui gagne de la valeur en fonction de l’énergie qu’on y a consacrée. Une terre agraire ne gagne de valeur que par le travail de l’agriculteur, les ressources minières ne gagnent que parce qu’elles ont été extraites… L’espace physique n’a de valeur que parce qu’il est protégé d’une manière ou d’une autre contre les intempéries ou contre les invasions de toute espèce. Peut-être qu’un jour, la Terre sera considérée comme équipartageable, de la naissance à la mort: un lopin pour soi, un lopin pour la vie de la communauté et un lopin intouchable au service de la Terre elle-même. Il y a là une véritable révolution de mentalité qui risque de ne pas plaire à beaucoup de monde. Et pourtant…

Serait-ce l’occasion de découvrir une nouvelle forme de synergie? Puisque tout le monde serait en «sécurité minimum», il pourrait contribuer «bénévolement» aux œuvres et services communs: santé, éducation, recherche, sécurité, transport… Si l’humain a besoin de repos et de sérénité, il a souvent besoin d’agir, ne fût-ce que pour le plaisir personnel de se savoir utile à sa communauté.

Serge Jadot
sj@hodo.fr

Pour l’anecdote

↑ⵐ:

En 1995, lorsque j’écrivis les Pionniers de Hôdo j’imaginais une monnaie de science-fiction.

Comme toute fiction, il s’agissait d’un artefact adapté à l’univers que je créais, mais en même temps, comme «science-fiction» cet artefact était construit à partir de ma propre culture de scientifique, de physicien.

Cela me poussait à trouver un système à la fois rigoureux et mesurable de manière fiable, c’est-à-dire d’avoir une référence universelle, comme la vitesse de la lumière, l’oscillation d’un atome, la caractéristique d’une particule…

Or le physicien est quelqu’un qui pense toujours aux énergies échangées dans tout type de transformations. Une monnaie basée sur l’énergie me semblait un bon outil dans mon univers.

Quel est le vrai sens de cet «outil» pour l’être physique, biologique et intelligent que nous sommes? En tant qu’êtres physiques, nous n’existons que par l’énergie et la matière. En tant qu’êtres biologiques, nous avons le besoin de vivre et de «sur-vivre», c’est-à-dire de prolonger notre existence pour la procréation ou la pérennité de l’espèce. Or cela se fait par l’acquisition d’énergie et de matière. L’intelligence vient renforcer ces derniers points en nous apprenant entre autres à conserver notre domaine riche en ressources, d’où la notion de domination. Pour éviter de vivre en permanence en conflit, cette intelligence nous pousse à négocier. Vivre en bonne intelligence nous conduit de gré ou de force à échanger. Or chaque type d’échange obéi à des protocoles acceptés par ceux qui veulent en profiter, d’où la naissance des modèles économiques et fiduciaires. Ainsi naquit l’«enn». Son nom fut choisi pour rappeler sa valeur intrinsèque, et aussi parce que la plupart des langues du monde commencent le mot «énergie» par le son «enn».

Ayant un peu étudié le japonais, et connaissant d’autres langues comme l’espagnol ou le néerlandais, je pensais que le mot «joule» devait être difficile à être prononcé de manière similaire dans toutes les langues. Or, comme le terme «Hôdo» vient du japonais, il m’était venu l’idée d’utiliser le hiragana す qui se prononce en français «sou». En effet, cette écriture a aussi l’avantage de se rapprocher d’un «J» doublement barré. Et, «subarashii (すばらしい)» n’est-ce pas «merveilleux» en japonais? Mais le jeu de mots était complexe, et un ami kabyle me lança une idée en m'apprenant l'existence d'un alphabet berbère.

Pour représenter cette monnaie, l’idée m’était venue d’utiliser un symbole contenant deux barres horizontales à l’instar de € ou du ¥(à noter au passage qu’en japonais, cela se prononce «enn»). J’eus aimé utiliser un ℏ(la constante de Planck, bien adaptée au sujet), mais il n’existe pas de lettre h doublement barrée dans les polices de caractères. En japonais, l’énergie (au sens de la physique) est エネルギー, et son écriture contient deux caractères, エ et ギ, qui pouvaient bien représenter cette monnaie. Mais, je trouvai un caractère tifinagh, ⵐ, proche du エ et ギ, et je l’adoptai.

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