L'Homme Imaginant

 

Un article de Livingstone.

Sa mission :

explorer de nouveaux concepts, découvrir de nouvelles manières de vivre, d'autres civilisations humanistes, et au risque du mépris, faire reculer l'obscurantisme.
Pastiche de « Sa mission : explorer de nouveaux mondes étranges, découvrir de nouvelles vies, d'autres civilisations, et au mépris du danger, reculer l'impossible. » (Star Trek)

Les idées de Henri Laborit choquent souvent, car elles donnent parfois l'impression que l'humain et ce qu'il y a de noble en lui sont en péril sous le regard cru du microscope. Tout se passe comme si l'on voulait chasser le pilote de sa voiture en lui faisant découvrir ce qu'il y a sous le capot. Pourtant, les virtuoses du pilotage sont souvent des gens qui sans être « mécano » connaissent leur véhicule.

Au passage, n'est-il pas présomptueux de vouloir mettre un pilote, une âme humaine, dans une voiture, le cerveau ? Nous ne savons pas ce qu'est le premier et nous commençons à peine à découvrir les arcanes du second. « On ne sait pas si Homère a existé, mais on est sûr qu'il était aveugle »

Le cerveau réagit violemment face à toute menace qui peut ébranler notre structure tant physique que psychique. Aussi paradoxal que cela puisse être, le cerveau a peur de se découvrir. Plus que l'« humanisme » à sauvegarder, c'est la peur des souffrances inutiles d'une existence sans raison qui effraie. Pourtant, nous sommes, infiniment loin de répondre au dernier Pourquoi.

Mais notre cerveau a besoin de certitudes, même les plus futiles comme l'horoscope que l'on trouve immanquablement partout. Le cerveau a besoin de croire qu'il domine la situation, qu'il est le pilote. Il se croit le seul maitre à bord de son univers étroit et s'il a accepté d'abandonner son anthropocentrisme pour n'être qu'une poussière d'étoiles, ce n'est pas demain qu'il acceptera d'abandonner son « humanocentrisme ».

Ce n'est pas pour devenir moins humain qu'il faut maîtriser avec efficacité l'un des fabuleux dons que nous avons reçus, et ainsi, à l'instar du pilote maîtrisant son véhicule, contrôler les dérapages, c'est pour mieux mettre toutes ses ressources imaginatives et créatrices au service de l'Humanité.

Jouer à l'autruche n'apporte rien. Pire, c'est s'offrir aveuglément au prédateur. En même temps qu'il est enrichissant d'utiliser son cerveau à bon escient en évitant de dominer autrui, il est avantageux d'être mieux averti du comportement dominant de ceux qui n'auront pas eux honte d'exploiter les mécanismes subtils de nos sentiments. Combien de « teams leaders » (pour parler « in ») reçoivent des formations pour gérer leur cerveau et celui de leurs « collaborateurs » qui ne reçoivent évidemment pas cette connaissance ? Les clés du pouvoir sont plus puissantes lorsqu'elles ne sont pas à la portée de la plèbe, aussi n'attendez donc pas qu'on décapite l'autruche si vous voulez avoir toute votre tête pour vous !

Le cerveau n'aime que les vérités qu'il peut entendre. Tout ce qui ne peut être digéré prend tout de suite des aspects inquiétants, voire repoussants.

Seule l'imagination peut briser l'étroitesse des vérités acceptées. Aussi, on oppose cette imagination à la froideur scientifique des arguments du neuropsychologue. Pourtant, l'imagination n'est l'apanage de personne en particulier : c'est celui de l'Humanité entière. Le vol d'Icare était-il seulement le rêve d'un poète ? Mais ne fallait-il pas plus d'imagination pour comprendre comme on tombe avant pouvoir voler? Il faut parfois une infinie patience à beaucoup de chercheurs, sur plusieurs générations, pour concrétiser leur imagination. La « froideur » scientifique ne doit pas cacher le courage de son imagination qui bouscule les concepts mêmes du temps, de l'espace et de la matière. Comme tout art, la science a ses méthodes, ses protocoles, ses recettes de cuisine, ses canons. Parle-t-on de la froideur de l'alexandrin en poésie ? La froideur scientifique ne doit pas être l'argument qui fait accepter les ombres de notre ignorance. Mais la peur est l'un des moteurs les plus puissants dans le cerveau. S'il a fallu un demi-siècle pour accepter le fait que la sexualité mène le monde par le bout du nez, il est à craindre qu'il en faille encore plus pour accepter que nous sommes des êtres vivants dotés de mécanismes aptes à nous aider à vivre.


Devenir un homme imaginant, c'était le voeu que Laborit faisait à l'Humanité.
Le Projet Hôdo est dédié à cet homme imaginant.
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